La disparition de Robin Williams m'a beaucoup remué. D'abord parce que j'ai grandi avec lui ; il m'a émerveillé et fait rêver au travers des films comme Hook, Le cercle des poètes disparus, Will Hunting, Good Morning Vietnam, The fisher King...
Mais ce qui me choque par-dessus tout, c'est son geste : il s'est donné la mort, révélant aux yeux de tous sa profonde douleur. Oui, les démons gagnent parfois à la fin. Ce geste témoigne de l'antagonisme entre ce qu'il dégageait et ce qui le torturait. Selon son agent, il luttait contre une "sévère dépression". Ceci nous fait nous poser la question : quelle est cette force irraisonnée qui pousse celui ou celle à se donner la mort ? Cette question m'est d'autant plus cruciale qu'ayant moi-même vécu une dépression, j'aurais pu avoir ce même geste et cela m’effraie !
La mort de Robin Williams met en lumière ce que vivent les dépressifs, obligés de porter des masques de convenances au prix d'incroyables efforts pour se rendre acceptables voire pour passer inaperçus. La dépression est considérée par tous -parfois par les dépressifs eux-mêmes- comme une tare, une erreur ou une faute. Robin Williams n'avait aucune raison d'être malheureux : une renommée méritée, une carrière certes irrégulière (il y a pire) mais reconnue de tous et un talent indéniable. Mais il n'était pas malheureux, il était dépressif. Nuance. La dépression est irraisonnée, irraisonnable, ne se justifie de rien, n'a besoin de rien pour noircir au plus profond le mental de sa victime. Elle est insensible à tout réconfort et se nourrit beaucoup de la culpabilisation. Le pire ? c'est le silence, le tabou. Taire la dépression, taire sa dépression est parfois ce qu'il y a de plus dangereux car on court le risque ce se laisser submerger puis étouffer par elle au point que le seul choix restant soit celui de se donner la mort.
Le suicide est l'un des plus grands tabous actuels : comme la dépression, il est irraisonné, contradictoire à notre instinct de survie (base même de notre existence) et dans sa violence il montre aussi les écueils de notre société (cf. cet article de Libération sur un rapport de l'OMS). Que Robin Williams, grande star hollywoodienne, se donne la mort est un non-sens brutal : il suffit de constater l'émotion qu'il suscite et les "pourquoi" qui émergent. J'ai pu lire des commentaires assez choquants disant qu'il fallait respecter sa liberté de partir, manière quelque peu surprenante de justifier son geste. Mais de quelle liberté parle-t-on ? Depuis quand peut-on associer "liberté" et "suicide" ? Quelqu'un qui s'est donné la mort est une personne acculée qui n'a plus d'autre choix ! La pression de son mal-être est supérieure, bien supérieure à son envie/volonté de vivre : il n'a plus le plus petit espace de liberté ! Rien ! Il n'y a plus qu'une victime d'un mal profond conjugué à sa solitude ! Un-e suicidé-e est toujours une personne abandonnée, laissée seule face à son mal aussi cruel que cela soit pour leur entourage. C'est une négation de la vie, un geste désespéré en aucun cas un cri de liberté ! C'est un gâchis...
Je nous le demande à tous : arrêtons de juger les dépressifs, arrêtons de vouloir les raisonner ou leur faire prendre soi-disant conscience que leur mal est illogique (oui, il l'est), arrêtons de les stigmatiser comme des chiffes molles sans volonté ou contre-productives, arrêtons de les abandonner sous le prétexte malheureusement vrai que toute parole réconfortante est inefficace. Arrêtons aussi de rendre le suicide romantique sous prétexte que de grands artistes se sont donné la mort. Il n'y rien de cool ou de romantique dans le suicide(*), seulement quelqu'un qui baisse définitivement les bras face à un mal plus fort que lui et des familles profondément et durablement marquées par ce geste violent.
Mais sachons vivre, partager, faire rire, aller ailleurs (et à plusieurs !), s'évader quitte à les bousculer gentiment un peu : voilà ce dont les personnes dépressives ont besoin pour échapper un peu à la pression de leur mal.
Nul besoin d'être obligé d'en parler : nous ne sommes pas leur psy et bien souvent serons impuissants face à leur mal-être. Sachons rester humbles face à cela et simplement être avec elles, vraiment et pleinement.
Et ne laissons plus les démons gagner à la fin.
(*) Frances Bean Cobain, fille de Kurt Cobain, a tweeté ceci à l'attention de Lana Del Rey qui regrettait de ne pas faire partie du club des 27 :
"The death of young musicians isn't something to romanticize...I'll never know my father because he died young & it becomes a desirable feat because ppl like u think it's 'cool....Well, it's f****** not. Embrace life, because u only get one life. The ppl u mentioned wasted that life. Don't be 1 of those ppl. ur too talented to waste it away".
Mais ce qui me choque par-dessus tout, c'est son geste : il s'est donné la mort, révélant aux yeux de tous sa profonde douleur. Oui, les démons gagnent parfois à la fin. Ce geste témoigne de l'antagonisme entre ce qu'il dégageait et ce qui le torturait. Selon son agent, il luttait contre une "sévère dépression". Ceci nous fait nous poser la question : quelle est cette force irraisonnée qui pousse celui ou celle à se donner la mort ? Cette question m'est d'autant plus cruciale qu'ayant moi-même vécu une dépression, j'aurais pu avoir ce même geste et cela m’effraie !
La mort de Robin Williams met en lumière ce que vivent les dépressifs, obligés de porter des masques de convenances au prix d'incroyables efforts pour se rendre acceptables voire pour passer inaperçus. La dépression est considérée par tous -parfois par les dépressifs eux-mêmes- comme une tare, une erreur ou une faute. Robin Williams n'avait aucune raison d'être malheureux : une renommée méritée, une carrière certes irrégulière (il y a pire) mais reconnue de tous et un talent indéniable. Mais il n'était pas malheureux, il était dépressif. Nuance. La dépression est irraisonnée, irraisonnable, ne se justifie de rien, n'a besoin de rien pour noircir au plus profond le mental de sa victime. Elle est insensible à tout réconfort et se nourrit beaucoup de la culpabilisation. Le pire ? c'est le silence, le tabou. Taire la dépression, taire sa dépression est parfois ce qu'il y a de plus dangereux car on court le risque ce se laisser submerger puis étouffer par elle au point que le seul choix restant soit celui de se donner la mort.
Le suicide est l'un des plus grands tabous actuels : comme la dépression, il est irraisonné, contradictoire à notre instinct de survie (base même de notre existence) et dans sa violence il montre aussi les écueils de notre société (cf. cet article de Libération sur un rapport de l'OMS). Que Robin Williams, grande star hollywoodienne, se donne la mort est un non-sens brutal : il suffit de constater l'émotion qu'il suscite et les "pourquoi" qui émergent. J'ai pu lire des commentaires assez choquants disant qu'il fallait respecter sa liberté de partir, manière quelque peu surprenante de justifier son geste. Mais de quelle liberté parle-t-on ? Depuis quand peut-on associer "liberté" et "suicide" ? Quelqu'un qui s'est donné la mort est une personne acculée qui n'a plus d'autre choix ! La pression de son mal-être est supérieure, bien supérieure à son envie/volonté de vivre : il n'a plus le plus petit espace de liberté ! Rien ! Il n'y a plus qu'une victime d'un mal profond conjugué à sa solitude ! Un-e suicidé-e est toujours une personne abandonnée, laissée seule face à son mal aussi cruel que cela soit pour leur entourage. C'est une négation de la vie, un geste désespéré en aucun cas un cri de liberté ! C'est un gâchis...
Je nous le demande à tous : arrêtons de juger les dépressifs, arrêtons de vouloir les raisonner ou leur faire prendre soi-disant conscience que leur mal est illogique (oui, il l'est), arrêtons de les stigmatiser comme des chiffes molles sans volonté ou contre-productives, arrêtons de les abandonner sous le prétexte malheureusement vrai que toute parole réconfortante est inefficace. Arrêtons aussi de rendre le suicide romantique sous prétexte que de grands artistes se sont donné la mort. Il n'y rien de cool ou de romantique dans le suicide(*), seulement quelqu'un qui baisse définitivement les bras face à un mal plus fort que lui et des familles profondément et durablement marquées par ce geste violent.
Mais sachons vivre, partager, faire rire, aller ailleurs (et à plusieurs !), s'évader quitte à les bousculer gentiment un peu : voilà ce dont les personnes dépressives ont besoin pour échapper un peu à la pression de leur mal.
Nul besoin d'être obligé d'en parler : nous ne sommes pas leur psy et bien souvent serons impuissants face à leur mal-être. Sachons rester humbles face à cela et simplement être avec elles, vraiment et pleinement.
Et ne laissons plus les démons gagner à la fin.
(*) Frances Bean Cobain, fille de Kurt Cobain, a tweeté ceci à l'attention de Lana Del Rey qui regrettait de ne pas faire partie du club des 27 :
"The death of young musicians isn't something to romanticize...I'll never know my father because he died young & it becomes a desirable feat because ppl like u think it's 'cool....Well, it's f****** not. Embrace life, because u only get one life. The ppl u mentioned wasted that life. Don't be 1 of those ppl. ur too talented to waste it away".